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L’intolérance, no Sir

MARIE-CLAUDE LORTIE mclortie@ledroit.com

Nous venons de terminer une semaine difficile.

Après le choc des restes d’enfants autochtones découverts à Kamloops est arrivé le choc de la tragédie islamophobe de London.

De la tristesse et encore de la tristesse sur des larmes à peine séchées.

Comme si on n’en avait pas déjà suffisamment versé avec tous ces morts de la COVID, tous ces féminicides, tous ces meurtres et injustices qui ont provoqué la révolte de Black Lives Matter, tout ce qui arrive depuis un an, deux ans. Je pourrais continuer la liste longuement.

Mais ce qui compte, c’est que depuis l’affaire Weinstein sortie en 2017, depuis la pandémie aussi, il y a un nouveau projecteur sur l’intolérable et une volonté de voir.

Des gens qui n’avaient jamais porté attention aux moins chanceux qu’eux, à leurs privilèges, commencent enfin à ouvrir les yeux.

Et tout cela nous oblige à un constat : nous sommes tous plongés dans ce pétrin. Quelle que soit notre identité. Et nous devons tous essayer de comprendre comment nous avons pu être injustes envers nos prochains. Et tous nous demander comment les moyens dont nous disposons dans la vie – que ce soit des outils financiers, du pouvoir décisionnel, des réseaux, des savoirs, toute forme de leadership ou de réflexion – peuvent être utilisés pour faire mieux pour les autres.

Pour ne pas exploiter, pour ne pas violenter, pour ne pas abuser, pour respecter, pour aider, pour améliorer, pour mobiliser.

J’écris tout ça parce que j’ai été choquée cette semaine par certaines accusations lancées par des commentateurs, dont certains dans de grands médias, et des personnalités politiques, qui ont tenu à continuer à faire rouler la machine à indignation alors que c’était surtout le temps de se regarder dans le miroir.

Ceux qui m’ont le plus choquée ? Ceux qui ont tenu à faire un lien absurde entre la tragédie de London et la loi québécoise sur la laïcité. Et ceux qui ont essayé de se faire du capital politique en alimentant cette polémique plutôt qu’en parlant des voies nécessaires de solutions pour l’avenir.

Comme s’il fallait trouver quelqu’un, quelque part, à blâmer. Comme si ça faisait du bien de se délester d’une certaine responsabilité en accusant les autres.

On peut penser ce qu’on veut de cette loi québécoise, mais elle n’est pas l’épicentre des problèmes canadiens de rejet de l’autre. La carte des crimes haineux montre que des gestes odieux ont lieu partout et que l’intolérance a cours d’un océan à l’autre à l’autre.

Kamloops est au fin fond de la Colombie-britannique. En mars, Edmonton a été secouée par une vague d’agressions contre des musulmanes. En décembre, c’était contre un noir, à Brandon, au Manitoba. Ce jeudi, Toronto enquêtait sur une attaque homophobe.

J’aimerais tellement que ceux qui accusent le Québec et les francophones d’intolérance voient que personne, nulle part, n’est à l’abri de ce mal. Et aussi à quel point ils sont eux-mêmes capables de cette discrimination qu’ils dénoncent si vertement chez les autres.

Comment est-ce possible qu’en 2021, certains tiennent encore à diviser le monde entre francophones et anglophones, entre le Québec et le reste du Canada ?

La vraie division, c’est entre les inclusifs et les intolérants.

Je vais le dire en anglais, tiens, pour me faire comprendre. La vraie division dans notre monde, elle est entre « those who care about others, and those who don’t care ». Which side are you on ?

Et là, c’est le temps de commencer à prendre soin des autres. De tous.

Pour ne pas qu’il y ait d’autres London.

Pas d’autres Kamloops. Pas d’autres Aqsa Parvez. Pas d’autre Lisette Corbeil ou Kelly Morrisseau, ou Annie Pootoogook.

Et certainement pas d’autre Fayez Afzaal, 9 ans, orphelin.

CHRONIQUE

fr-ca

2021-06-12T07:00:00.0000000Z

2021-06-12T07:00:00.0000000Z

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