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L’EXODE VIRTUEL DES DRAG QUEENS DE TORONTO

ÉMILIE PELLETIER epelletier@ledroit.com Initiative de journalisme local

La scène drag au Canada a pris de l’ampleur au cours des dernières années. En Ontario comme au Québec, les drags — queens et kings — se sont révélé (e) s au grand public plus que jamais, mais avec la pandémie, cette scène a été durement frappée. État des lieux avec des acteurs et des actrices de ce pan culturel qui reprend vie, peu à peu.

TORONTO — La crise sanitaire causée par la COVID-19 a fait danser le tango à la scène drag torontoise, lui faisant faire deux pas devant, deux pas derrière.

Elle avait réussi à atteindre une importante notoriété à travers l’amérique du Nord au cours des dernières années, notamment depuis que la compétition de Ru Paul’s Drag Race s’est déplacée au Canada, le temps d’une saison.

Mais depuis mars 2020, de nombreux lieux de rassemblement pour la communauté LGBTQ+ ont dû fermer leurs portes.

Ces fermetures ont entraîné des drag, queens et kings, à plier bagage.

« Plusieurs interprètes ont déménagé et ont arrêté de faire du drag. Ceux qui pouvaient se le permettre sont restés, mais plusieurs ont réalisé que le loyer était trop élevé. Certains sont retournés chez leurs parents, ou dans leur pays d’origine. Il y a en ce moment un effet d’aspirateur au sein des interprètes de la scène drag à Toronto », déplore Bom Bae, une drag queen qui, comme plusieurs, oeuvre principalement sur le Web depuis le début de la pandémie.

Bom Bae explique que le monde drag est divisé entre l’est et l’ouest de la métropole canadienne.

« Plusieurs bars ont dû fermer dans l’ouest, où l’on retrouve des modes de performances plus expérimentales et alternatives, et où il n’y a pas de règles. Dans le Village, c’est plus restrictif. Plusieurs d’entre nous ne savent pas où aller, alors même avec le déconfinement, nous n’avons nulle part où aller. »

Aux dires de cette drag queen, le salaire de base alloué par les établissements et les efforts nécessaires pour offrir des performances de qualité n’en valent pas la chandelle. « Est-ce que je suis excitée de retourner sur scène ? Oui, mais je vais continuer de faire ce que je fais en ligne, où je rapporte beaucoup plus d’argent que lorsque j’offre des performances en personne. »

Allysin Chaynes, également drag queen à Toronto, affirme avoir consacré beaucoup de temps et d’efforts créatifs envers son contenu numérique, comme les podcasts.

« Ce canal m’a sauvée. Ç’a changé mon expérience au cours de la pandémie, me permettant de travailler de façon hebdomadaire, d’offrir des performances, des spectacles, alors c’est sûr que je vais continuer. »

Allysin Chaynes ressent aussi une certaine appréhension face au retour aux performances en personne.

« Il y a aussi le fait que les choses ont changé durant la pandémie.

Avant, je travaillais cinq soirs par semaine, et même si j’adore offrir des spectacles, je n’ai pas la même endurance pour cela en ce moment. Je vais devoir trouver une balance, et découvrir ce que je préfère offrir en tant qu’artiste. Je n’arrêterai pas de travailler, mais je cherche à savoir comment créer et offrir mon contenu différemment. »

Bom Bae promet qu’elle n’abandonnera pas ses fans, qui l’ont suivie en mode virtuel tout au long de cette pandémie : « La diffusion en ligne me permet d’avoir mon propre horaire, de ne pas avoir à entrer en contact avec des propriétaires de bars louches, et ça me permet de me connecter avec beaucoup plus de gens, et pas seulement à Toronto ou au Canada. (...) Et plusieurs personnes ne se sentent pas en sécurité dans les bars. Les bars gais ont la réputation de mal accueillir les femmes, par exemple. En ligne, il n’y a pas à payer un prix d’entrée, il n’y a pas de boissons à des prix faramineux, et c’est plus accessible pour les personnes handicapées. »

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2021-07-24T07:00:00.0000000Z

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