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Rallier les souverainistes ou le surprenant défi du Parti québécois

JEAN-MARC SALVET CHRONIQUE jsalvet@lesoleil.com

Que voilà un bien étrange défi pour un parti souverainiste : rallier les souverainistes… Après avoir relevé que Québec solidaire (QS) ne peut gonfler les muscles de satisfaction avec 11 % d’intentions de vote, surtout pas quand on se souvient qu’il a déjà enregistré des marques de 14, 15 et même 17 % dans des enquêtes d’opinion précédentes – et décroché 16 % des suffrages aux dernières élections générales –, il faut parler de l’« ex aequo ». Il faut parler du Parti québécois (PQ).

Lui aussi pointe à seulement 11 % d’intentions de vote dans le dernier sondage Léger. Et plus grave encore pour lui, il est bon dernier chez les 18 à 34 ans, qui sont nombreux à être peu réceptifs à un discours perçu comme trop « identitaire ». Et encore plus grave pour le PQ, ce n’est pas Paul St-pierre Plamondon que ses sympathisants voient comme « meilleur premier ministre », mais François Legault !

Le déclin du PQ est amorcé depuis très longtemps. Son option phare, la souveraineté, n’attire plus autant depuis belle lurette. C’est ce qui avait conduit François Legault à créer la Coalition avenir Québec (CAQ), il y a 10 ans.

Avec 17 % des suffrages aux élections d’octobre 2018, le PQ a obtenu 10 sièges, 10 sur 125. Alors, qu’est-ce que ce serait avec seulement 11 % des votes, si le sondage paru dans les médias de Québecor se répercutait dans les urnes ?

Pour continuer d’exister et compter sur l’échiquier politique, le Parti québécois doit absolument rallier à lui des souverainistes partis à la CAQ. C’est le minimum. Et pour ce faire, il doit combattre une idée largement répandue chez les souverainistes voulant que ce soit François Legault qui serait un jour le mieux placé pour déclencher un référendum sur la souveraineté. Pas dans ce mandat-ci, mais dans un autre. S’il le voulait et si les circonstances politiques s’y prêtaient, bien entendu.

Les péquistes doivent convaincre que cette idée n’est rien d’autre qu’une chimère. Ils doivent en persuader un nombre suffisant d’indépendantistes, s’ils ne veulent pas être lessivés davantage au prochain scrutin, en octobre 2022. À ce moment-là, ils devront au moins faire aussi bien qu’au dernier – si on peut le dire ainsi. Ne pas faire pire, autrement dit.

Les péquistes pourraient suggérer que ce n’est certainement pas à la lumière des résultats obtenus par le Bloc québécois que M. Legault, très sensible à l’opinion publique, ira un jour dans cette direction. Ce n’est pas que les bloquistes ont mal fait. Le problème, d’un certain point de vue, c’est qu’ils n’aient pas mieux fait, compte tenu du tollé ayant entouré la question tordue posée à Yves-françois Blanchet par l’animatrice du débat des chefs en anglais. M. Legault et son entourage ont dû prendre bonne note du fait qu’en dépit du concert d’indignations ayant suivi ce débat, le résultat du Bloc a été à peu près le même qu’aux élections fédérales précédentes.

Mais ce n’est pas un argument que les péquistes pourraient utiliser pour affirmer qu’un homme à ce point sensible à l’opinion publique n’avancera jamais dans la direction de l’indépendance. Car cet argument, fondé sur le résultat du Bloc, pourrait bien se retourner contre eux.

Alors ? Alors, au PQ, on collige. On collige minutieusement toutes les déclarations de François Legault et celles des ténors de son gouvernement pour convaincre des souverainistes de revenir au bercail. On a confectionné une liste de quelques dizaines de déclarations dans lesquelles M. Legault et ses ministres se disent opposés au projet souverainiste ou pas du tout disposés à tendre vers la souveraineté.

C’est bien beau une liste comme celle-là. Mais encore faudrait-il que le PQ soit entendu lorsqu’il fait écho à l’une ou l’autre de ces déclarations. Or, il n’est pas tellement entendu.

Et même s’il l’était, bien des souverainistes continueraient malgré tout de croire à l’option Legault, y compris ceux pour qui la souveraineté constitue une réelle priorité – ce qui n’est pas le cas pour tous.

Alors, oui, aussi paradoxal que cela puisse paraître, c’est un vrai défi pour le parti fondé il y a plus de 50 ans de ramener aujourd’hui chez lui des indépendantistes et d’ainsi espérer faire meilleure figure dans les urnes que ce que lui prédisent les sondages – le dernier Léger, en tout cas.

CHRONIQUE

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2021-10-16T07:00:00.0000000Z

2021-10-16T07:00:00.0000000Z

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