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VOYAGES Ne négligez pas Jasper

JONATHAN CUSTEAU jonathan.custeau@latribune.qc.ca

Des fois, je me garde la surprise. Je planifie le voyage de façon serrée pour m’assurer de célébrer mes incontournables, mais je néglige les recherches et modère mes attentes pour quelques extra, pour des villes, des quartiers dont je ne connais rien. Tantôt, c’est en gardant une troisième journée pour une ville où on n’en recommande que deux. C’est le vertige contrôlé de ne pas savoir si ça en vaudra la chandelle. Tantôt, c’est en prévoyant une nuit à Jasper, en

Alberta, sans avoir la moindre idée de ce que j’y ferais.

Jasper, c’est le bout de la promenade des Glaciers. C’est aussi la ville principale du parc national du même nom. Comme Banff. Personne ne me reprochera donc d’avoir rapidement tiré des conclusions, d’avoir imaginé la ville du nord comme celle plus au sud : de gros hôtels, de la villégiature, une ville qui puise ses couleurs dans l’industrie touristique.

Des fois, j’aime bien qu’on réfute mes conclusions hâtives.

Jasper, c’est tout petit. On n’y trouve pas de grands hôtels en bois rond à tous les coins de rue, même si la quantité de restaurants et de boutiques de souvenirs n’est de toute évidence pas destinée aux quelque 4800 habitants. Connaught Drive, la rue principale, quand on s’écarte de la grand-route, est bordée de ces restaurants qui débordent de la présence des étrangers. On peut sans doute s’en lasser rapidement.

Il reste qu’en arrivant à Jasper, j’ai eu l’impression d’une ville hors du temps. D’abord un poste de traite de fourrure, la ville a connu un essor en raison de sa position géographique. Les étrangers cherchant un pied-à-terre pour poursuivre leur aventure dans les Rocheuses et l’ouverture de la promenade des Glaciers ont fait grimper le nombre de visiteurs. Ceux recherchant la villégiature optent pour le Fairmont Jasper Lodge, un hôtel composé de plusieurs chalets en bordure d’un lac.

Le côté vieillot de la ville, lui, il vient peut-être de la vieille caserne de pompiers, transformée en bureau d’information touristique. Ou de l’hôtel mythique où j’ai trouvé la chambre la moins chère de Jasper, ce soir-là. L’hôtel Athabasca, ouvert en 1929, a gardé sa touche d’époque. On comprend que tout le décor a été rafraîchi pour garder des références à un autre siècle. Les bustes d’animaux accrochés dans le vestibule, les moquettes épaisses dans les corridors et le mobilier imitant des antiquités nous transportent à l’époque où,

semble-t-il, les Bing Crosby et Marilyn Monroe y séjournaient.

On est probablement loin de ce qu’offrent les établissements luxueux, mais cet hôtel en plein coeur de la ville vaut le détour pour son cachet.

De là, j’ai surtout aimé traverser la rue pour fréquenter le petit parc, en face, où les fleurs rendent très photogénique le lieu historique national du Centre-d’accueil-duparc-jasper, un bâtiment de pierre et de bois qui sert, comme son nom l’indique, de centre d’information. La beauté se trouve souvent dans les petites choses.

Quand on n’est que de passage, les stationnements publics, si on se montre le moindrement attentif, peuvent être gratuits. Ce n’est pas le cas directement dans la rue, mais la ville est si petite que les parcs de stationnement ne sont jamais bien loin.

Et à distance de marche, on ralliera facilement Connaught Drive, où se trouvent la gare patrimoniale et une vieille locomotive à vapeur en mode exposition. Jasper demeure d’ailleurs une ville de transit, le trafic ferroviaire y étant constant lors de ma visite.

Après deux heures, on a fait le tour, à pied s’il vous plaît, du minuscule centre-ville. Pourtant, je me suis pris à vouloir rester encore. C’est que l’on compte plusieurs adresses gastronomiques prisées des touristes, entre autres des microbrasseries. Plusieurs restaurants offrent un effort soutenu pour présenter un menu qui se démarque. Les fins gastronomes savent pointer les cuisines les plus en vue, mais le nombre limité de tables pourrait vous forcer à vous rabattre sur des options moins originales.

L’heure tardive de mon arrivée m’a permis de décrocher un siège au Raven Bistro, visiblement toujours plein, où l’originalité et le mélange des saveurs sont de mise. Les trois pharaons, un mélange de boeuf, de poulet et d’agneau, constitue son plat signature, même si on dit beaucoup de bien de la casserole de fruits de mer au coco. Dans le « centre-sudouest » de l’alberta, on est pourtant encore bien loin de la mer. Je me suis pris à vouloir rester. J’ai plutôt pris la route au nord de la ville, celle menant au lac Pyramide. Le plan d’eau de 1,2 km carré permet de courtes excursions en canot ou en pédalo. Cela dit, le pédalo risque d’amoindrir le plaisir et de jeter un peu d’ombre sur la beauté du paysage. Foi de celui qu’on ne reprendra pas sur un pédalo. Une plage et des sentiers de randonnée se trouvent aussi autour du lac.

Dans un itinéraire serré, il est probable qu’on néglige Jasper. Ce serait pourtant une erreur à laquelle je suis heureux d’avoir échappé.

LE MAG

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2021-10-16T07:00:00.0000000Z

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