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JOUER LE JEU DE LA TARIFICATION DYNAMIQUE

CAROLYNE LABRIE clabrie@lequotidien.com — PHOTO LE PROGRÈS, JEANNOT LÉVESQUE

En cette semaine glaciale où les Québécois ont établi un nouveau record de consommation d’électricité, certains devaient limiter leurs dépenses en énergie pendant les heures de pointe. Bienvenue dans le monde de la tarification dynamique.

L’almatois Jimmy Dionne « joue le jeu » pour la première fois. Pour y participer, il faut être invité par la société d’état. Cet hiver, 160 000 Québécois sont inscrits au programme, ce qui vient chambouler leurs habitudes de consommation d’électricité. « J’ai pris le “forfait peureux”. Je n’ai donc pas de pénalité si je consomme plus que prévu, mais je peux avoir un crédit si j’ai bien fait les choses », explique-t-il.

Ce « forfait peureux » est en fait le crédit hivernal, l’une des deux options de la tarification dynamique. L’autre étant le tarif Flex D, celui qu’a choisi l’almatoise Karine Routhier il y a trois ans, au tout début de ce programme.

Le défi est plus grand : entre décembre et mars, en dehors des heures de pointe, le prix de l’électricité est moins élevé que le tarif que payent tous les Québécois. Mais pendant les heures de pointe, la facture « est multipliée par trois. Il faut donc faire très attention », souligne-t-elle.

Si le premier participant est enthousiaste et multiplie les idées pour économiser de l’énergie, la deuxième l’est un peu moins et a même pensé « l’arrêter cette année ».

L’HEURE DE POINTE, MOMENT CRUCIAL

Hydro-québec évalue qu’une trentaine d’événements de pointe surviennent, au cours de l’hiver. Ils peuvent avoir lieu du lundi au vendredi, entre 6 h et 9 h, ainsi qu’entre 16 h à 20 h. Ils arrivent par temps froid, lorsque la demande en électricité est à la hausse. Les participants sont toujours avertis 24 heures à l’avance.

« C’est un déploiement progressif que nous effectuons, mais le but est de le rendre disponible à tous assez rapidement », explique le porte-parole de la société d’état, Cendrix Bouchard.

Ce dernier ajoute que c’est une suite logique aux conseils écoénergétiques répétés chaque année. « On tente de sensibiliser les gens à être plus efficaces. Ça fait vraiment une différence sur les pointes et on en demande alors moins au réseau. À long terme, ce sont moins de bris d’équipement et autres problèmes. »

Karine Routhier vit avec son conjoint et quatre enfants. « Sauter une journée ou deux de lavage et manger des sandwichs un soir, c’est correct, mais quand ça fait deux matins et trois soirs que tu as un événement, ça devient compliqué », explique la mère de famille.

Le premier hiver, elle suivait les recommandations à la lettre. Pendant les événements, il n’était pas question d’utiliser le lave-vaisselle ou la sécheuse. Le chauffage était baissé dans la maison ; les lumières, fermées. « Je me levais plus tôt pour chauffer la fournaise à bois. »

L’almatoise a toutefois été déçue lorsqu’elle a vu son économie finale : 125 $. « Pour tous les efforts, je ne voyais pas une si grande différence. »

Chez les Dionne, qui ont connu jusqu’à maintenant moins de dix événements de pointe, le père de deux enfants juge que ça se passe bien. « On a un poêle à bois, donc ça aide beaucoup. Je me lève vers 5 h le matin pour le chauffer et ça nous permet d’avoir une belle

« Pour tous les efforts, je ne voyais pas une si grande différence.»

— Karine Routhier

chaleur dans la maison. Les jours de pointe, on fait même réchauffer le souper sur le poêle à bois pour ne pas utiliser le four. »

Jimmy Dionne ajoute qu’il s’est doté d’une thermopompe, il y a quelques années. Les plinthes électriques fonctionnent donc très rarement. Sinon, il n’y a pas de lavage, de lave-vaisselle ou de cuisson au four pendant un épisode. « C’est juste de s’habituer. Ton lave-vaisselle, tu peux le partir après 20 h. »

L’almatois ferme également son chauffe-eau pendant un événement de pointe. « On l’a essayé et ça marche. L’eau reste chaude à l’intérieur. Ma fille a pu prendre une douche et son frère est allé dans le bain. »

DES BORNES DE RECHARGE

Jimmy Dionne s’intéresse plus sérieusement à la consommation d’électricité et aux kilowattheures depuis qu’il s’est acheté un véhicule électrique, il y a quelques mois. Il est convaincu qu’avec l’augmentation du nombre de ces véhicules sur la route, les Québécois n’auront pas le choix d’adapter leur consommation d’électricité. « Ma borne de recharge prend un breaker dans la boîte électrique. C’est une bonne demande d’énergie, alors c’est certain qu’on ne pourra pas tous les alimenter pendant un épisode de pointe. Il faudra une borne intelligente ou une minuterie pour recharger les véhicules pendant la nuit », croit M. Dionne.

Chez Hydro-québec, on explique que les voitures électriques ne surchargeront pas le réseau, mais qu’il faut tout de même « prévoir notre moment où on les recharge », souligne M. Bouchard.

Éventuellement, les résidences pourront être dotées de bornes bidirectionnelles. « Ce que ça veut dire, c’est que les gens vont pouvoir recharger leur voiture, mais aussi utiliser l’énergie de la

« Les jours de pointe, on fait même réchauffer le souper sur le poêle à bois pour ne pas utiliser le four.»

— Jimmy Dionne

voiture pour la maison lorsque nécessaire », ajoute-t-il.

Karine Routhier a aussi une voiture électrique « D’ailleurs, si mon chum branchait la voiture pendant un épisode de pointe le premier hiver, je me mettais à chialer après, confie l’almatoise avec un sourire en coin. Ça devenait un stress tout ça. Cette année, on le fait, mais moins intensément. »

Cette dernière a d’ailleurs « décroché pas mal » quand elle a remarqué qu’après une absence de six jours, elle avait quand même des fluctuations et des augmentations d’utilisation d’énergie. « Mes thermostats étaient tous à 17 °C. Je pense que ma maison n’est peutêtre pas adaptée. C’est un bungalow des années 70 et les fenêtres ne sont pas récentes. Elle n’est sûrement pas assez étanche. »

La famille Dionne a plutôt une résidence « rénovée avec le programme Rénoclimat ».

Cendrix Bouchard admet que certaines constructions sont « mieux adaptées » que d’autres, dans le sens où un logis écoénergétique va perdre beaucoup moins sa chaleur lorsqu’il faut baisser de quelques degrés les thermostats. « Une maison peut perdre jusqu’à 25 % de sa chaleur », indique-t-il.

Les deux participants, déjà sensibilisés à la consommation d’énergie responsable, croient que les Québécois devront assurément faire plus d’efforts, ou du moins être plus sensibles à l’utilisation de l’hydroélectricité, une ressource bien peu dispendieuse.

HILO, LA MAISON INTELLIGENTE

En parallèle à la tarification dynamique, la filiale Hilo s’est aussi mise en branle. Le service clés en main est un ensemble que doit acheter le consommateur et qui comprend des interrupteurs, des prises intelligentes et des gradateurs. Tous les appareils sont alors branchés à une application sur le téléphone intelligent du client, qui choisit ses réglages.

Étant lui-même un utilisateur, Cendrix Bouchard l’explique avec enthousiasme. « Quand une heure de pointe est prévue, j’ai programmé mes équipements pour que la température monte dans la maison et la préchauffe. Ensuite, la température baisse pendant le défi. »

Il ajoute que les lumières extérieures peuvent aussi y être branchées, de même que le chauffe-eau. « Dans une maison, 50 % de la facture d’électricité, c’est le chauffage pour réchauffer l’air et 20 %, c’est le chauffe-eau », précise l’adepte d’hilo.

Les clients de la filiale d’hydroquébec voient leur facture d’électricité diminuer d’environ 15 %, soit 125 $ par an.

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2022-01-15T08:00:00.0000000Z

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