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«CHOISIR SES BATAILLES »

DANIEL LEBLANC dleblanc@ledroit.com

Quand on se compare, on se console. Un simple coup d’oeil au tableau blanc sur lequel était inscrit l’horaire des cours à distance au sein du clan Beausoleil-williamson, cette semaine, avait de quoi donner le vertige. Sauf que la famille de La Pêche est rodée au quart de tour et voit les défis de la période trouble que l’on traverse comme «une belle leçon d’humilité et de résilience».

Dans ce ménage du secteur Masham, on ne compte pas quatre, cinq ni même six places à la table de cuisine, mais tenez-vous bien : 14.

Des 12 enfants âgés de 1 à 17 ans du couple formé de Tania et Keven, trois sont d’âge préscolaire, alors que les neuf autres étaient rivés à leurs écrans, au cours de la dernière semaine – troisième période de fermeture prolongée des écoles depuis mars 2020 au Québec – pour de l’apprentissage virtuel.

Si l’aîné Yohann a désormais quitté le nid familial et suit un cours de charpenterie-menuiserie à l’école des métiers spécialisés Asticou, ses frères et soeurs Loic, Isaac, Mahia, Éli, Livia, Nohlan, Romie, Flavie, Phélix-antoine, Callum et Hanaé étaient quant à eux bien en selle à la maison durant ces derniers jours où à la fois l’organisation, le lâcherprise et l’entraide étaient plus que jamais de mise.

Même si chaque fois ce n’est pas évident, reste que la machine s’est huilée et que la famille était, comme d’autres, beaucoup mieux préparée à cette éventualité que quand la COVID-19 a frappé de plein fouet il y a deux ans.

« C’est comparer des pommes et des oranges. Ça se passe super bien. Les prénoms sont écrits au-dessus de toutes les feuilles qui sont imprimées et qu’on distribue seulement le matin, pas avant. On a trouvé de petits trucs pour rendre l’expérience plus agréable. Quand tu sais où tu t’en vas, c’est plus facile. La première fois [en 2020], on faisait beaucoup de gestion de peines, de crises, alors que maintenant tout roule mieux. On prépare tout la fin de semaine précédente, dont les repas, y compris les collations. Tout est déjà prêt et il ne reste qu’à le sortir du congélo ou le mettre au four. Je me mets super à jour dans mon lavage : alors qu’habituellement on parle de six brassées par jour, là j’essaie d’en avoir juste deux au maximum. Les enseignants nous envoient des documents à l’avance aussi et on s’écrit un horaire que je plastifie tellement je l’utilise. C’est ce qui nous sauve. On met une alarme 10 à 15 minutes avant les heures de connexion [aux cours]. On annule tous les rendez-vous pour se concentrer sur l’école », raconte la mère de famille.

Cette fois, des clés LTE pour améliorer la connexion Internet avaient été fournies à la famille de l’outaouais, sans compter que chaque enfant a reçu un ordinateur ou une tablette, ce qui s’est avéré, dit-elle, « un gros bonus et un poids en moins sur les épaules ».

Cette dernière ne le cache pas : au sein d’une famille nombreuse, et de surcroît dans de telles circonstances exceptionnelles, l’une des clés du succès réside dans le fait que « tout le monde doit mettre la main à la pâte » et que le mot d’ordre est de « choisir ses batailles ».

Le coup de main, notamment de la part des adolescents, est d’autant plus primordial que le papa est absent du lundi matin au jeudi soir, car il travaille à Montréal.

« Le vendredi, il travaille à réorganiser la maison, à faire certains travaux d’entretien, car dans une maison avec 14 personnes, il y a toujours quelque chose à réparer, du ménage à faire. Pour l’école à distance, il a aussi organisé les bureaux des enfants. Il les appelle pour les encourager, prendre de leurs nouvelles. Il est absent une partie de la semaine, mais quand il est ici, il est tout là et s’implique. Il a un beau rôle làdedans, j’ai pas mal de chance. Sinon, on n’aurait pas 12 enfants, je pense. J’ai une bonne gang », dit fièrement Tania Beausoleil.

Optimiste, celle-ci estime que la dynamique de l’école à distance, et plus largement la pandémie, ont le mérite d’avoir eu certains bénéfices, comme de démontrer l’importance de s’écouter et de se concentrer sur l’essentiel, dans une

société où l’on valorise constamment la performance.

« On ne peut pas être des super mamans, des superwomen et exceller dans tout. Tu dois baisser tes standards, y aller avec les priorités. Pour moi, c’est le bien-être de mes enfants et le sommeil. Quand la maman dort bien, tout le reste va. Il y avait des choses qui fonctionnaient tout croche pendant la semaine, on ne peut pas tout contrôler », note-t-elle.

UN NAVIRE À RÉORIENTER

Confiant se sentir « à bout de souffle » après 22 mois de pandémie et d’incertitude, elle affirme que malgré les nombreux progrès, la reprise d’une vie normale POST-COVID sera la bienvenue, car l’école à distance nécessite passablement d’adaptation dans sa maisonnée.

« On ne réoriente pas un navire comme on veut, on ne peut pas improviser avec 12 enfants. Ç’a été beaucoup d’essais-erreurs au départ, il y avait du découragement, j’étais à bout de ressources, alors que je suis quelqu’un de super créatif. Avant, les écrans, ça n’a jamais été notre fort comme famille, on passe beaucoup de temps à l’extérieur », indique-t-elle.

Quand on parle de troubles d’apprentissage et d’impacts sur les jeunes, Mme Beausoleil, qui tient du même coup à lever son chapeau bien haut aux enseignants « qui ont mis de la magie à 200 % dans les cours en ligne », affirme être à même de constater certaines choses chez ses propres enfants.

« Je vois une différence. Les plus jeunes qui vivent la COVID ne sont pas du tout au même endroit que leurs frères et soeurs quand ils avaient le même âge, par exemple avec la lecture ou le calcul, qui sont plus fragiles. Les effets à long terme me font un peu peur. On parle beaucoup des aînés, mais les enfants et les ados sont aussi les grands perdants », explique-t-elle.

Et au fait, dans une aussi grande famille, à quel point les fermetures de groupes à la garderie ou à l’école sont venues chambouler le quotidien depuis 2020 ?

« On a été chanceux dans la mesure où ça n’a pas été tout le monde en même temps, mais depuis deux ans, il n’y a eu que cinq jours où il n’y avait personne à la maison. Je les ai savourées, ces journées-là, je suis par exemple allée déjeuner seule au restaurant. Les maux de gorge, la toux, les maux de ventre, il y avait toujours quelque chose. Ça désorganise une routine et on n’a pas encore repris le contrôle de tout ça. Je suis bien contente que les mesures aient été allégées à certains endroits, j’ai besoin de me ressaisir un peu. C’est rock’n’roll, mais on sait que bientôt, ce seront des souvenirs a et on va en rire », conclut Tania Beausoleil.

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