LeQuotidienSurMonOrdi.ca

LUMIÈRE ET MAGIE DU CINÉMA SUR DISNEY+

STEEVE FORTIN CHRONIQUE steeve.fortin@lequotidien.com

Disponible depuis le 27 juillet sur Disney+, Light & Magic est une série documentaire sur l’extraordinaire histoire D’ILM (Industrial Light & Magic). Ses six épisodes sont incontournables pour quiconque s’intéresse le moindrement au cinéma, car ils mettent en lumière la magie des artisans de l’entreprise fondée par Georges Lucas à travers des images d’archives incroyables et des confidences de ses ténors. En regardant cette série, on se rend vite compte à quel point ILM a été un rouage important du cinéma dans les 45 dernières années.

En 1975, le cinéaste George Lucas prépare le tournage de son troisième long métrage, un projet ambitieux qui en laisse plus d’un dubitatif dans l’industrie du cinéma, en raison des nombreux effets spéciaux que nécessite ce film de science-fiction. On parle ici de Star Wars, vous aurez compris. « Quand on a commencé à travailler sur le premier film [Star Wars], je me suis renseigné auprès des labos d’optique et des sociétés d’effets spéciaux. Je me suis rendu compte que personne n’était capable de faire ce que je voulais. J’ai compris que j’allais devoir monter ma propre société, embaucher tout un groupe de personnes spécifiquement pour ce film », raconte George Lucas.

Le réalisateur, scénariste et producteur confie alors à John Dykstra la mission hasardeuse de réunir une équipe de créateurs polyvalents pour littéralement inventer les outils nécessaires à cette révolution cinématographique. Les premiers épisodes de la série de Disney+ sont justement consacrés à la création des effets spéciaux pour la trilogie originale de Star Wars. Les artisans ont rivalisé d’ingéniosité pour créer les premières caméras dirigées par ordinateur, entre autres.

Fondée d’abord et avant tout pour concevoir les effets spéciaux de Star Wars, ILM s’est vu confier d’autres projets d’effets spéciaux pour des amis de Georges Lucas, une façon de faire travailler cette main-d’oeuvre unique en son genre entre ses productions. Avec la série Light & Magic, nous avons donc accès aux coulisses des effets spéciaux derrière Indiana Jones, Poltergeist et E.T. On constate alors que les artisans D’ILM sont en mesure de créer autre chose que des batailles dans l’espace.

Dans les années 1980, ILM est responsable des effets spéciaux de la quasi-totalité des films à

succès au box-office. À l’époque, ils consistent essentiellement à filmer des maquettes sur un fond bleu pour ensuite superposer les images aux décors du film. Cette technique est habilement maîtrisée par ILM grâce aux caméras contrôlées par ordinateur.

Même si le boulot ne manque pas pour le studio d’effets visuels, George Lucas désire développer des effets spéciaux nouveau genre, tout en révolutionnant les techniques de production du cinéma. Pour y arriver, il investit des sommes colossales dans la conception de matériel informatique et de logiciels.

À ce moment, la vision de Lucas va bien au-delà de la création cinématographique.

L’INFORMATIQUE QUI CHANGE LE MONDE

En 1979, George Lucas fonde un département informatique chez ILM avec en tête de lice Ed Catmull, un pionnier de l’animation par ordinateur, à une époque où tout est à inventer, du matériel au logiciel. Son équipe fabrique alors un ordinateur capable de créer des images de synthèse, le Pixar Image Computer. Le développement de toute cette technologie est un véritable gouffre sans fond pour Lucas, d’autant plus que les effets numériques se limitent à quelques animations plus ou moins réussies.

Ed Catmull embauche ensuite John Lasseter, qui désire créer un film d’animation entièrement par ordinateur. Mais Lucas ne voit pas les choses de la même manière et vend la division Pixar à Steve Jobs.

En 1995, Pixar, avec en tête Ed Catmull et Steve Jobs, révolutionne le petit monde du cinéma en produisant le premier dessin animé entièrement conçu par ordinateur, Histoire de jouets, réalisé par John Lasseter.

LE BON ET LE MAUVAIS DU NUMÉRIQUE

Après la vente à Pixar, le département d’informatique D’ILM se concentre sur les effets spéciaux numériques, qui ne sont pas toujours réussis, jusqu’au jour où James Cameron utilise un personnage entièrement informatisé dans une scène de quelques secondes de son film The Abyss, en 1989. Deux ans plus tard, Cameron repousse les limites de l’animation par ordinateur avec le personnage du T-1000, interprété par Robert Patrick dans

Terminator 2. Le T-1000 a la particularité de pouvoir se liquéfier pour changer d’apparence et les effets spéciaux numériques créés par ILM sont sublimes pour l’époque.

En 1993, Steven Spielberg bouleverse à son tour l’industrie du cinéma avec Jurassic Park, qui présente plusieurs dinosaures entièrement numériques d’un réalisme jamais vu à l’époque. Ce succès donne le coup d’envoi d’une révolution numérique des effets spéciaux au cinéma, mais plusieurs films de l’époque sont risibles aujourd’hui, en raison de l’abus d’images de synthèse dont les textures détonnent avec le réel.

En 1997, Georges Lucas ajoute des effets numériques – majoritairement très douteux – à la première trilogie de Star Wars, pour la présenter dans les cinémas comme une édition spéciale contenant des scènes inédites. Dans les faits, le numérique vient gâcher toute la magie des films et n’apporte rien à l’histoire. Aujourd’hui, ce sont ces versions qui sont disponibles en haute définition, et c’est très dommage ! Devant cet échec, plusieurs admirateurs de la série originale tentent de créer une version « déspécialisée » haute définition, mais les bobines 35 millimètres originales en bon état se font plutôt rares.

Vers la fin des années 1990, George Lucas produit une nouvelle trilogie de Star Wars qui se déroule avant la première. Cette prélogie, filmée presque entièrement sur fond bleu est, selon moi, un véritable désastre, en raison de l’abus de numérique pas tout à fait au point.

Le numérique s’est grandement amélioré, au cours des dernières années, grâce aux moteurs de jeux vidéo, lesquels permettent un rendu en temps réel. Mais je présume que ce que nous trouvons exceptionnel aujourd’hui sera risible demain !

Light & Magic est une série incontournable, habilement réalisée par Lawrence Kasdan, qui dresse le portrait d’une période pivot de l’histoire cinématographique, celle de la transition des maquettes vers le numérique.

ACTUALITÉS

fr-ca

2022-08-06T07:00:00.0000000Z

2022-08-06T07:00:00.0000000Z

https://lequotidien.pressreader.com/article/281822877565281

Groupe Capitales Media