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Un pari audacieux

DANIEL CÔTÉ ÉDITORIAL dcote@lequotidien.com

Le virage que prendra le Festival international des Rythmes du Monde (FIRM), au cours de la prochaine édition, prévue du 10 au 14 août, a quelque chose de vertigineux. Quitter pour de bon la rue Racine, berceau de cet événement qui célébrera ses 20 ans, ne représente que l’un des aspects de cette profonde mutation. S’y ajoutent l’accent mis sur la programmation payante offerte sur la Zone portuaire de Chicoutimi et la visibilité relativement modeste accordée aux musiques du monde.

Ces orientations étaient présentes l’an dernier, sauf que le contexte ne permettait pas de tirer des conclusions définitives. Qu’il ne se soit rien passé dans le haut de la rue Racine n’était guère étonnant, puisque la Santé publique demandait aux promoteurs de maintenir une certaine distanciation. C’est pour cette raison que sur la Zone portuaire, la limite imposée par Québec s’élevait à 2000 spectateurs, même si Charlotte Cardin et les Cowboys Fringants auraient pu en attirer davantage. Il était plus facile de la faire respecter à cet endroit, vu que l’accès était payant.

S’agissant des musiques du monde, elles avaient été réduites à la portion congrue et, là encore, on a pu croire qu’il s’agissait d’une mesure temporaire. Comme les frontières du Canada étaient encore fermées, il ne servait à rien de signer des vedettes internationales évoluant à l’intérieur de cette mouvance. Seuls des artistes établis au Québec, tels Paul Kunigis et la formation Ayrad, avaient pu se frayer un chemin dans le volet gratuit de programmation.

Ajoutons que c’était la première édition du festival depuis 2019 et que dans l’intervalle, son cofondateur, Robert Hakim, avait quitté ce monde. La petite équipe qui a vaillamment assuré la suite des choses, malgré les délais serrés et le chagrin causé par cette perte, n’avait pour seule mission que de relancer la machine en espérant pour le mieux. Les enjeux stratégiques, ce serait pour l’édition suivante, celle qui débute mercredi.

S’ils méritent qu’on s’y attarde, c’est en raison du statut dont jouit le FIRM. Seul festival de la région membre du Regroupement des événements majeurs internationaux, son pouvoir d’attraction auprès des touristes en a fait un produit d’appel. Les gens de l’extérieur savaient qu’ils pouvaient séjourner à Chicoutimi pendant leurs vacances, avec l’assurance que les soirées ne seraient pas tristes. Hôtels et restaurants en ont largement profité.

Le virage confirmé cette année est audacieux, à cet égard. Les têtes d’affiche ont été vues dans plusieurs régions de la province, depuis le début de la belle saison. Leurs mérites sont bien réels, mais à l’exception notable du Québec Redneck Bluegrass Project, elles ne font pas écarquiller les yeux comme, jadis, un Cat Empire, une Angélique Kidjo ou un Rachid Taha. Il y a donc là une réelle gageure.

L’autre défi de l’organisation sera de faire oublier à quel point la rue Racine était conviviale, en particulier pour la clientèle locale. Avant même le début des spectacles, les gens s’y rendaient dans le même esprit que les Robervalois à l’occasion du Souper dans les rues de la Traversée. Pour faire un brin de jasette avec des proches, souvent croisés par hasard, avant de profiter de la programmation gratuite. Grandes oubliées de nos festivals, les personnes âgées étaient particulièrement sensibles au charme de ces happenings.

Lors du dévoilement de la programmation, des voix se sont élevées contre l’étiolement du volet gratuit. D’aucuns ont invoqué le fait que le FIRM reçoit des subventions, ce qui devrait militer en faveur d’une plus grande accessibilité. Ces considérations montrent à quel point il est délicat de modifier L’ADN d’un événement auquel tant de personnes ont adhéré et pourquoi l’édition 2022 sera déterminante. Les interrogations qu’elle soulève, seul le public aura le pouvoir d’y répondre.

ÉDITORIAL

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2022-08-06T07:00:00.0000000Z

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