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UN PÉRIPLE RAFRAÎCHISSANT DANS LE DÉSERT

FÉLIX LAJOIE flajoie@lesoleil.com

Les voyages sont souvent rafraîchissants, littéralement: bord de mer, plongée sous-marine, excursion en bateau, etc. Pour sa part, la Jordanie offre peu de sources d’eau, mais des résidents vraiment accueillants et bienveillants. De quoi rafraîchir deux jeunes voyageurs québécois.

En avril dernier, Émile Chamard venait tout juste de terminer son cours de pilote d’avion, sans toutefois trouver de poste. Il avait envie de voyager. De son côté, Annecatherine Blais venait de prendre congé de l’université pour la session d’hiver, après avoir réalisé à l’automne que le bac en agronomie n’était pas pour elle.

Les deux amis âgés de 22 ans, qui se sont connus à l’école secondaire Cardinal-roy à Québec, lors de compétitions de ski de fond, ont donc décidé de partir ensemble en voyage.

En tentant de déterminer une destination à leur périple, ils tombent sur la Jordanie. Le prix des billets d’avion est excessivement bas, et le coût de la vie y semble aussi peu élevé.

Peu après, les deux jeunes voyageurs tombent sur une application mobile incluant une carte et tous les détails au sujet du trajet de marche, qui traverse littéralement le pays du nord au sud.

De plus, sur le long du chemin, ils pourront planter leur tente, ce qui réduit encore plus les frais de leur voyage. Vendu ! Ils partent pour un mois faire une randonnée de plus de 600 kilomètres en Jordanie.

LES PREMIÈRES MINUTES ANGOISSANTES

Sur le site du gouvernement du Canada, les avertissements sont nombreux concernant les voyages en Jordanie. Surtout au sujet des femmes et des règles qu’elles devraient essayer de suivre au pays, la grande majorité des résidents pratiquant l’islam sunnite.

Mis à part les environs de la cité de Pétra, considérée comme l’une des sept merveilles du monde moderne, le pays est loin d’être touristique. Certains voyageurs moins aventureux auraient ainsi pu craindre de vivre de mauvaises expériences, et ne pas trouver refuge en cas de pépins.

« Surtout moi, en tant que femme, j’avais des inquiétudes, mais j’ai suivi les conseils comme apporter des vêtements longs, et à deux on se disait que ça allait bien aller », raconte Anne-catherine, en entrevue avec Le Mag.

À leur arrivée à l’aéroport d’amman, il faisait nuit. Les deux voyageurs se sont donc directement dirigés vers l’hôtel en taxi, sans

«Sans qu’on demande rien, il nous a servi de l’eau de sa bouteille, du thé et ensuite de grosses assiettes de poulet avec du riz et des patates assaisonnées.»

— Émile Chamard

voir la ville ni les habitants. Le lendemain matin, en jetant un coup d’oeil à travers les vitres de leur chambre, ils sont devenus très anxieux.

Alors qu’ils étaient « étampés » dans la fenêtre de leur chambre, Émile et Anne-catherine ont eu un choc de dépaysement. Ils ont soudainement réalisé où ils étaient rendus.

« J’étais tellement stressée, je me demandais comment j’allais faire pour sortir de la chambre », relate Anne-catherine.

Toutefois, cette angoisse s’est rapidement dissipée, grâce à l’accueil rafraîchissant des habitants de la région.

« On marchait sur le trottoir pas longtemps après être sortis de l’hôtel, et une voiture s’est arrêtée près de nous et ils nous saluaient par la fenêtre. Un monsieur en est sorti et il est venu vers nous », commence à raconter Émile.

L’homme portait une tenue traditionnelle, composée d’amples vêtements blancs et beiges avec un Keffieh sur la tête.

« Il s’est approché de moi, il a pris ma casquette, l’a mise sur sa tête, et a pris son chapeau pour le mettre sur ma tête, tout ça en riant », continue Émile, encore ébahi par ce qu’il a vécu.

« Ils riaient, prenaient des selfies avec nous en nous serrant contre eux, soudainement on ne se sentait plus du tout en danger », ajoute Anne-catherine.

À LA DÉCOUVERTE DE L’HOSPITALITÉ LOCALE

Au début de leur périple à pied, les deux aventuriers traversent surtout des champs et rencontrent peu d’habitants, mis à part des chiens qui surveillent les champs pour éloigner les animaux.

Sur le long du chemin, ils plantent leur tente çà et là, sans aucun problème. « On ne comprenait pas trop leur notion de propriété privée. On pouvait s’installer dans le milieu du champ et personne ne venait nous voir pour nous déranger », dit Anne-catherine.

Les seules fois où les gens viennent les voir, c’est pour leur offrir de l’eau ou de la nourriture. Certains leur offrent même un toit pour la nuit.

« Un soir, on a planté nos tentes dans un champ pas très loin d’une habitation […] et un monsieur est venu nous voir. Sans qu’on demande rien, il nous a servi de l’eau de sa bouteille, du thé et ensuite de grosses assiettes de poulet avec du riz et des patates assaisonnées », s’étonne Émile.

Les deux voyageurs ont avalé tout le repas, même s’ils venaient de manger depuis peu.

Que ce soit lors de leurs rencontres avec les tribus de peuples bédouins dans le désert ou lorsqu’ils sont passés dans les villages plus touristiques au sud, ils racontent avoir été accueillis « comme de la famille ».

Certaines rencontres ressemblaient presque à une visite chez les grands-parents : on vous fait rougir en vous offrant un plat maison après l’autre, si ce n’est pas un lit pour le temps d’une nuit.

« Une fois, on est allés dans une petite épicerie et le propriétaire n’arrêtait pas de venir nous voir et de nous demander si on avait besoin de quelque chose », commence Émile.

À force d’insister, ils ont cédé. Les deux voyageurs lui ont demandé s’il ne pouvait pas les mener quelque part en voiture, puisque leurs sacs à dos étaient très lourds après avoir été remplis de provisions.

« Il a appelé un de ses amis, qui est venu nous chercher à l’épicerie. Il nous a reconduits à l’entrée du sentier avec sa voiture, sans rien nous demander en échange ! », lâche-t-il.

Il faut toutefois noter qu’émile et Anne-catherine avaient adopté une stratégie pour être bien reçus et ne pas causer de malaise : celle de prétendre qu’ils étaient mariés.

« Une seule fois, on a dit la vérité, que j’avais un copain au Québec, et certaines personnes ont commencé à faire des blagues un peu malaisantes […] après, on a décidé de garder notre stratégie », explique Anne-catherine. Les coutumes locales, notamment vestimentaires, ne s’appliquent pas qu’aux femmes. Émile l’a découvert alors qu’il était allé faire des commissions en ville.

« Une fois, on était dans une ville, et je suis sorti en shorts pour aller au Mcdo. Vraiment, les gens me dévisageaient, et je ne comprenais pas trop pourquoi. Finalement, j’ai regardé sur Internet et, de ce que j’ai compris, c’est comme si j’étais sorti en sous-vêtements », dit Émile.

Il a donc laissé ses shorts dans son sac pour le reste du voyage.

UNE SEULE CRAINTE

Ainsi, les deux aventuriers racontent que leur voyage a fait tomber certains préjugés ou certaines craintes qu’ils auraient pu avoir auparavant. Exception faite des 15 premières minutes après la sortie de leur première nuit à l’hôtel, ils disent ne s’être jamais sentis en danger.

Toutefois, un facteur aurait pu leur faire craindre le pire, s’ils n’avaient pas été adéquatement préparés : l’accès à l’eau.

Bien entendu, la majorité du pays est désertique. Toutefois, même dans les régions plus au nord, où la végétation est bien présente, les lacs et rivières sont extrêmement rares, expliquent les deux voyageurs.

Ils avaient prévu cette éventualité, en traînant toujours des réserves d’eau suffisantes pour au moins deux ou trois jours. Les sacs à dos étaient lourds à traîner, mais au moins ils n’ont jamais eu peur de mourir de soif.

L’application qui leur montrait la route à suivre indiquait aussi des points d’accès à l’eau. Cependant, ces repères n’étaient pas tous exacts. Heureusement, les habitants qu’ils croisaient sur leur route n’hésitaient pas à leur en fournir.

À la fin de leur voyage, ils ont parcouru la zone protégée de Wadirum avec son désert et ses canyons.

Une bande de locaux qui passait par là a gentiment invité les deux voyageurs à prendre place dans la boîte de son pick-up pour explorer davantage cette magnifique région. Ils se sont fait promener gratuitement dans le désert, de belvédère en belvédère, jusqu’au coucher du soleil, avant de se faire reconduire directement à leur hôtel.

Au total, ils ont parcouru environ 675 kilomètres à pied… moins cinq heures de trajet (gratuit) à dos de chameau ! Une expérience que les deux voyageurs et leurs fesses endolories ne sont pas près d’oublier.

ARTS

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2022-08-06T07:00:00.0000000Z

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