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LE FUTUR EST MAINTENANT POUR ROUILLIER

JEAN-NICOLAS PATOINE jnpatoine@lesoleil.com

Manon Rouillier aime prendre des risques. Le lancement de l’agence de marketing «nichée» qui porte son nom en était un. Celui de doubler la superficie de l’entreprise, en ce moment, en est un autre. «Le statu quo n’existe pas dans ma vie. D’être déstabilisée, c’est ce qui me stabilise», dit-elle au cours d’un entretien avec Le Soleil.

Rouillier est une agence de marketing spécialisée dans les industries minière et forestière.

Cette vocation fait sens : Manon Rouillier est née en Abitibi d’un père entrepreneur minier, l’homme derrière l’entreprise Forages Rouillier. Elle a grandi dans le monde minier, dans le monde des affaires.

Pour un temps, elle a toutefois rêvé de journalisme. Mais après ses études en communications à l’université d’ottawa, sa carrière prend une autre direction. Elle occupe quelques emplois à Québec, entre autres chez Louis Garneau, puis plonge et lance Rouillier en 2009.

Le Soleil a rencontré la femme de 47 ans dans les bureaux de son entreprise de 16 employés, avenue Saint-jean-baptiste, alors que « la grosse croissance de Rouillier commence maintenant ».

Q

Qu’est-ce qui vous a incité à fonder Rouillier en 2009?

R

J’avais perdu mon emploi précédent, car la compagnie pour laquelle je travaillais venait de se faire acheter. Mon chum m’a dit : « Crime, pourquoi tu ne te lances pas en affaires ? » Je côtoyais déjà les gens de l’industrie. Alors je me suis dit go, je me lance. Mais un ami de Québec m’a dit : « Manon, il y a des agences à tous les coins de rue. Comment vas-tu faire pour te différencier ? » C’est comme ça que j’ai décidé de choisir un secteur de niche. Et veux, veux pas, en ayant le nom Rouillier, ça m’a aidé, car les gens faisaient la connexion avec Forages Rouillier.

Q

Est-ce que c’était un pari risqué, selon vous, de choisir une telle niche?

R

J’étais vraiment confiante. Tout est un pari en affaires. Mais quand t’es entrepreneur, tu te lances. Si tu y penses trop longtemps et que tu commences à trop analyser, tu viens de rater ta fenêtre d’opportunité. C’est ça être en affaires : si on ne prend pas de risque, on n’avance pas.

Q

L’entreprise aura 14 ans l’an prochain. Comment évaluezvous sa progression?

R

C’est très lent. Quand j’ai pris la décision, je me demandais : « Comment je commence ça, cette business-là ». Mon père m’avait répondu : « Un client à la fois. Ne perds pas ton nom, fais-le bien ». Ça m’est toujours resté, on l’a toujours fait comme ça. On aurait vraiment pu grossir plus vite, mais quand ton nom est sur la porte, tu ne peux pas perdre ta réputation. Je dis que j’aime prendre des risques, mais j’aurais pu en prendre davantage avant. Mais aujourd’hui, je mise sur tout : on grossit les bureaux, on embauche, on prend des gros clients. Sky is the limit. La grosse croissance de Rouillier commence maintenant.

Q

De quelle façon les stratégies de marketing et de communication ont-elles changé depuis 2009 dans l’industrie minière?

R

Dans les premières années, on mettait de l’avant le produit ou le service de l’entreprise, c’est ce qu’il fallait faire connaître, nos plans étaient basés là-dessus. Depuis trois ans environ, il faut davantage travailler le top : la marque de l’entreprise. On dirait qu’avant, on se foutait un peu plus de la raison d’être et des valeurs, on voulait vendre les produits. Maintenant, la première question qu’on pose aux clients, c’est : dites-nous qui vous êtes, quel est votre ADN. Ça change la donne des mandats, car on travaille maintenant l’interne et l’externe. Ça aide les compagnies dans leur rétention de main-d’oeuvre.

Q

Vous avez présenté une nouvelle image de marque la semaine dernière. Pourquoi avoir fait ce changement ?

R

Parce qu’on était vraiment rendus là. Côté notoriété auprès de la clientèle, on rayonne partout au Québec. Mais l’image ne suivait pas ça. […] On a décidé de travailler sur nous. Attirer les clients, on a ce bout-là. Mais pour attirer la main-d’oeuvre et

«

C’est ça être en affaires : si on ne prend pas de risque, on n’avance pas.»

— Manon Rouillier

se faire connaître auprès des jeunes, on a une job à faire. On s’est donc dit qu’on devait travailler notre « marque employeur ». On a maintenant une image dynamique, avec une palette de dix couleurs, une typographie plus douce, plus fine, plus humaine. Et notre slogan, « Activateur de croissance », nous donne l’allure d’un incubateur.

Q

En 2019, vous avez lancé le Podcast Minier, qui en est maintenant à 46 épisodes avec vous à la barre. Quel était l’objectif derrière ce projet ?

R

Je suis une pro podcast. J’en écoute en m’entraînant, dans l’auto. Je me suis demandé comment je pouvais redonner à l’industrie minière, comment mettre en lumière ces acteurs-là, les dirigeants, les gens qui travaillent en développement durable, un explorateur, un mineur, un drilleur. On ne les connaît pas, ces gens-là, le Québec ne les connaît pas. Les gens qui travaillent dans l’industrie sont passionnés, c’est fou. Ils croient en leur industrie, ils croient en leur mine. C’est tellement beau de les entendre. C’était une façon de faire rayonner encore plus les produits et les services des entrepreneurs.

Q

Les industries minières et forestières ont souvent mauvaise presse, mauvaise réputation, en particulier au niveau environnemental. Est-ce que ça vous choque?

R

Oui, ça me choque. Et c’est pour ça que j’ai parti le podcast. Parce qu’il y en a, de belles réalisations. Il y a des lois, des normes qui sont mises en place. Les entreprises y adhèrent. Il y a des choses qui sont dites qui ne sont pas vraiment véridiques, mais vient un temps où personne ne veut sortir dans les médias pour dire : ce que vous avez dit n’est pas vrai.

Si l’industrie minière n’était pas là au Québec, tu ne pourrais pas m’enregistrer avec ça [NDLR : remarque dite en pointant les deux iphone du journaliste qui enregistrent la conversation — on n’est jamais trop prudent]. On est pro véhicules électriques… mais ça prend du lithium ! Le Québec se démarque énormément, et si on veut continuer de se démarquer, continuer à avoir nos emplois ici, l’industrie minière doit être vue d’un oeil positif.

Oui, c’est fâchant. Mais quand on travaille dedans et qu’on réalise tous les efforts déployés par ces entreprises-là, c’est merveilleux. C’est sévère, il y a plusieurs lois. Mais le commun des mortels ne sait pas ça. […]

Si quelqu’un me dit qu’il est contre l’industrie minière d’un point de vue environnemental, je lui dis : vas-y ! Va travailler là, fais une différence. C’est hyper innovant, c’est dynamique. Les gens sont très réceptifs, on veut tous changer les choses. Si tu travailles en environnement, il y a plein de postes en développement durable un peu partout dans l’industrie minière.

Q

En plus de l’agrandissement et de l’embauche de nouveaux employés, quelles sont les prochaines étapes pour l’entreprise ?

R

Je veux qu’on continue d’être partout au Québec, c’est là-dessus qu’on mise. On a aussi été choisis pour le projet Vortex du gouvernement, qui alloue 14 millions $ aux PME qui ont des produits ou des services innovants pour l’industrie minière. Rouillier, avec 48e Nord International [NDLR : une autre agence de développement, sise en Abitibi], va s’occuper de la commercialisation et du marketing des produits innovants. Déjà qu’on a le vent dans les voiles, le projet Vortex va venir amplifier notre vocation auprès de l’industrie minière.

AFFAIRES

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2022-12-03T08:00:00.0000000Z

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