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CINDY CÔTÉ REND HOMMAGE À DES VICTIMES DU NAZISME

DANIEL CÔTÉ dcote@lequotidien.com

GRÂCE AU ROMAN D’ABORD L’ARROGANCE, PUIS VINT LA GUERRE

Une douzaine d’années se sont écoulées entre le début du travail de recherche et la sortie du premier roman de Cindy Côté, D’abord l’arrogance, puis vint la guerre. Férue d’histoire, l’écrivaine originaire d’hébertvillestation, maintenant établie dans l’outaouais, a eu besoin de tout ce temps pour rendre justice au drame vécu par des citoyens de l’allemagne nazie dont l’unique «tort» fut de composer avec un handicap physique ou mental.

N’étant pas conformes à l’idéal tordu véhiculé par sa machine de propagande, le régime traquait ces personnes en invoquant la nécessité de préserver une forme d’hygiène raciale sur son territoire. Chacune d’elles devait être stérilisée, ce qui fut le cas du personnage fictif au coeur du roman, la jeune Hildegarde. Sourde de naissance, elle avait beau posséder toutes les qualités qu’on souhaite retrouver chez des adolescents, le sort que le gouvernement lui réservait était de ne pouvoir porter un enfant.

« C’est une femme forte, comme plusieurs personnes qui se sont battues contre cette mesure, à l’époque. Elle provient d’une famille qui l’aime dans sa différence, ce qui est le cas notamment de son grand-père Oscar, un entendant qui exerce la fonction d’enseignant. Il comprend bien ce qui se passe dans la société », a décrit Cindy Côté à l’occasion d’une entrevue téléphonique accordée au Progrès. Très tôt, en effet, les Nazis ont mis leurs menaces à exécution, à la manière d’un rouleau compresseur.

Le livre rend bien l’état d’esprit de Hildegarde et de ses proches, à mesure que se rapproche le moment où une lettre lui ordonnera de se présenter dans une clinique. Sa volonté d’échapper à cette fatalité est encore plus forte depuis qu’une de ses proches s’est mise à dépérir, sous l’effet d’une intervention ratée. Que ce soit par le biais de son journal ou de la narration assurée par l’écrivaine, on perçoit le sentiment d’enfermement qu’elle éprouvait, autant que les craintes qu’il lui fallait surmonter pour rester lucide.

« Ma première démarche a été de constituer une ligne du temps, ce qui a permis d’établir que dès les années 1920, l’eugénisme était présent en Allemagne. Je voulais aussi montrer comment des femmes comme Hildegarde ont essayé de contourner la loi et à quel point ce parcours a été traumatisant. En raison de la propagande du régime, ces personnes étaient déshumanisées. Dans la société, on avait du mépris pour elles », relate Cindy Côté.

Une première version du manuscrit était complétée lorsqu’elle a effectué un voyage en Pologne et en Allemagne, dans le but de visiter des sites associés à la Deuxième Guerre mondiale. Cette connaissance du terrain l’a incitée à remanier quelques passages avant de confier le roman aux Éditions David, en 2020. En librairie depuis le 25 octobre, il a fait l’objet d’un lancement à Ottawa, puis à Hébertville-station, le 6 novembre.

« Je suis vraiment contente de mon livre. La couverture. La bibliographie à la fin. Quand je l’ai examiné pour la première fois, je me suis dit que c’était une belle récompense pour le travail accompli. Je peux maintenant aller à la rencontre du public, ce que j’ai commencé à faire récemment, au Salon du livre de Montréal. J’adore parler de l’histoire, ainsi que des faits de société mentionnés dans le roman. J’ai hâte de le faire au prochain Salon du livre du Saguenay-lac-saintjean », souligne Cindy Côté.

Dans son premier roman intitulé D’abord l’arrogance, puis vint la guerre, Cindy Côté raconte de quelle manière une jeune femme sourde de naissance a tenté d’échapper à la politique de stérilisation imposée par les Nazis. Le personnage central est fictif, mais le contexte historique, lui, est tristement conforme à la réalité vécue en Allemagne dans les années 1930. PHOTO COURTOISIE, JEANNINE CLÉMENT

AU CANADA AUSSI

Preuve que l’histoire tend à se répéter, y compris dans le registre de l’horreur, l’écrivaine a appris avec tristesse que la politique de stérilisation préconisée par les Nazis a trouvé son équivalent au Canada. Il est maintenant démontré que plusieurs femmes issues des Premières Nations ont subi l’indignité d’une stérilisation, parfois même à leur insu. Ces révélations qui remontent à quelques jours l’indignent autant que le comportement des maîtres de l’allemagne vis-à-vis Hildegarde.

« C’est vraiment terrible, ce que ces femmes ont vécu. Elles ont été prises dans le même genre de situation que celles exposées dans mon roman et plus tard, des hôpitaux les ont empêchées de savoir ce qu’il y avait dans leur dossier. On a fait ça au Canada, pratiquer l’eugénisme négatif. Or, la définition est claire. Empêcher un groupe de se reproduire constitue un acte génocidaire », fait remarquer Cindy Côté.

LE MAG

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2022-12-03T08:00:00.0000000Z

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